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Ker Asia

1895 in Formosa


Film taïwanais sorti le 7 novembre 2008

Si on s’en tient au sujet – la résistance de la population de Taïwan face à l’invasion japonaise consécutive à la défaite de la Chine des Qing - ‘‘1895 in Formosa’’ aurait pu être un grand film d’action d’autant que l’histoire s’y prête avec un scénario qui s’appuie, de surcroît, sur des faits réels jusqu’à faire parler les protagonistes dans leur langue. C’est à dire le Hakka pour Wu-Tanxing, Xu-Xiang et Jiang Shaozu, les figures de la résistance locale si on peut dire car ce n’est pas avec des machettes et des bâtons en bambou qu’ils pourront vaincre une armée japonaise inférieure en nombre certes mais bien mieux armée et surtout aguerrie. C’est pourtant ce qu’ils tenteront de faire et c’est la raison d’être du film qui se propose d’illustrer, avec les moyens du 7e Art, cette page sanglante de la première guerre de Taïwan qui se soldera par l’occupation de l’île durant 50 ans. Or, si tous les ingrédients sont réunis pour en faire un grand film d’action, le scénario ne semble pas verser dans le récit classique d’actes de bravoure à résonance ethnique, dans notre cas, quand bien même fallait-il beaucoup de courage pour vouloir affronter un ennemi déterminé à mains nues ou presque et c’est sans doute cela qui confère au film toute son originalité à défaut de séduire par des scènes spectaculaires comme bon nombre de films historiques sur les grandes batailles. Si ‘‘1895 in Formosa’’ se sert bien du contexte de guerre, c’est plutôt pour montrer sa perception par les différentes ethnies qui peuplent l’île et au travers des désaccords entre les chefs de la résistance. Le film pose la question du conflit armé pour les populations partagées entre la lutte et la soumission et au-delà, du sens même de cette guerre. Ce qui nous donne une histoire certes violente mais surtout ramenée à l’échelle de l’individu - aussi bien du côté de la résistance que japonaise - avec toutes les questions que cela suppose pour chacun. Pour cela, le scénario s’appuie sur une histoire d’amour pour thème central - entre Wu-Tanxing et Huang Xianmei - qui verra Wu défendre la terre qu’il avait défrichée dans la région de Miaoli et sur laquelle se trouve son usine à camphre et pour ainsi dire, tout son avenir qu’il faut désormais défendre car plus qu’une propriété, il la considère d’abord comme sa patrie. Elle l’est d’ailleurs pour tant d’autres de ses compatriotes mais sans que ces derniers aient un sens aussi aigu du devoir bien que le danger soit désormais aux portes de chaque village. Moins démonstratif que narratif pour ainsi dire, ‘‘1895 in Formosa’’ est un film tout en nuance où dialogues et sentiments sont privilégiés sur l’action et s’il faut en retenir quelque chose, disons qu’à défaut de livrer un tableau sanguinolent de cette page tragique de l’île, le parti pris scénaristique de faire vivre la guerre dans les esprits avant les actes est tout à fait recevable. Cela n’en fait pas un film psychologique pour autant mais simplement humain et c’est ce qu’on oublie d’ailleurs un peu trop souvent dans des films dits de guerre. Dans tous les cas, cette page de la résistance des populations de Taïwan mérite bien un hommage et toute l’originalité du film est d’avoir su s’affranchir des pesanteurs académiques qui entachent souvent la démarche quand ce n’est pas la violence gratuite qui sert de prétexte. Notons pour terminer que si la photographie est fort belle, la musique bien que belle aussi a une fâcheuse tendance à alourdir l’ambiance ce qui n’est pas rédhibitoire en soi mais on pouvait faire plus simple quand il s’agit de faire parler les sentiments.


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