Comme tout sageuk qui se respecte, ‘‘Empress Ki’’ se doit d’être à la hauteur. C’est-à-dire irréprochable dans la reconstitution des décors et des costumes sur le plan photographique tout du moins. De ce point de vue, le drama ravira donc les fans ‘‘d’historiques’’ mais il faut dire que l’histoire avec un grand H l’exige aussi lorsqu'il s'agit d’évoquer la vie d’une impératrice et pas n'importe laquelle ! Pour le moins surprenant, elle est tout simplement inconnue du grand public. Étrange choix pour un scénariste, s'il en est, le pari d’en faire une biographie est donc plus que hasardeux à moins d’y ajouter une pincée de romance pour rendre les choses attractives.
Quant à la dynastie Yuan - qui a gouverné la Chine durant prés de 90 ans comme successeur des Song - l’évocation de cette période semble n’être qu’un prétexte pour faire évoluer les protagonistes dans un contexte de fin de règne précédé, en cela, par la mort de l’empereur mongol que d’aucuns ne laisseraient sans suite… Aussi, le décor est-il planté d’emblée et si l’empire commence à vaciller sur ses fondations, il ne tient qu’au plus méritant de lui rendre sa grandeur, comme pensent certains prétendants au trône, mais c’est oublier que la lignée de Gengis Khan est loin d’être éteinte quand bien même le dernier prince mongol est-il traqué par ses adversaires dans un seul but, l’éliminer...
Ainsi, commence une longue histoire qui fait entrer en lice toute une palette de personnages qui n’aspirent qu’à se tailler une place dans un nouveau pouvoir ou retrouver leur place, pour certains, voire conquérir le trône par des alliances, pour les autres, d’autant que Ta-hwan – frère et successeur désigné de l’empereur défunt – ne semble pas y renoncer. La raison qui s’impose à lui est simple. Le sang de ses ancêtres coule dans ses veines et il ne peut se dérober à son destin quitte à accepter l’exil, dans un premier temps, pour se protéger de ses ennemis.
Ainsi posée, l'intrigue va se dérouler tout au long des 51 épisodes pour laisser libre cours à l’imagination, parfois bien débordante, des scénaristes – Jang Young-chul et Jung Kyung-soon – car si l’impératrice a bien existé, la plupart des personnages qui gravitent autour d’elle sont fictifs. Mais peu importe et chacun l’aura compris, dès les premières séquences, qu’il s’agit moins d’Histoire que de romance historique ce qui n’est pas nouveau sous le ciel des dramas. Aussi, faut-il rappeler que dans la catégorie des sageuk, il existe trois sous-catégories pour distinguer les œuvres fictives, inspirées de faits réels - dont fait partie ‘‘Empress Ki’’ - et les réalisations qui se veulent respectueuses de la vérité.
C’est pourquoi, on ne sera pas surpris par certaines invraisemblances dans ce drama, car du reste, cette impératrice au fort tempérament est on ne peut plus attachante pour ne pas dire charismatique surtout avec Ha Ji-won, pour l’incarner, et qu’on a déjà vu briller dans ‘‘As One’’. Grâce à son talent particulièrement expressif dans le pathos notamment – et que tout amateur saura apprécier mouchoir en main - il est clair que le destin de la future impératrice ne peut qu’émouvoir au regard des drames qui ne manquent pas de jalonner son chemin. Mais est-ce suffisant pour retenir l’attention jusqu’au bout ? 51 épisodes n’est pas un nombre négligeable quand beaucoup de dramas, pourtant prometteurs, s’essoufflent rapidement quand ils ne partent pas dans tous les sens par manque d’imagination.
Dans notre cas, l'impératrice Ki - Seungnyang dans sa jeunesse - a plus d’une corde à son arc en plus d’un don particulier pour survivre et il faut bien cela pour défier le pouvoir des Yuan quitte à perdre des êtres chers en chemin et même des plus chers. Cruel destin donc et dans un monde cruel où le sort des femmes ne tient à rien quand ce n’est pas l’esclavage qui les attend, voici donc la vie de notre future impératrice, armée de son seul courage et de sa détermination pour assouvir une vengeance quasi impossible face aux puissants, car il s'agit bien de cela dès le début du drama. Ce thème reviendra d'ailleurs comme un leitmotiv jusqu'au moment où tout va basculer face à un ennemi inattendu et dans un endroit tout aussi inattendu.
Violence, sentiments, suspens et drames, il n'y a pas forcément de quoi faire un sageuk différent des autres quand beaucoup en contiennent déjà mais il faut reconnaître que ce drama possède quelque chose de plus. En y regardant de plus près, ce n'est pas tant dans les dialogues, les effusions ni dans les scènes d'action et encore moins dans l’intrigue qu'il faut chercher que dans le personnage même. ‘‘Empress Ki’’ a, de fait, le visage d'une femme courageuse tout simplement et dans laquelle beaucoup aimeraient pouvoir s’identifier certainement mais en faisant, toutefois, abstraction de l'époque.
C'est uniquement par un malheureux concours de circonstances qu'elle accède au pouvoir suprême quand bien même ignore-t-elle jusqu’où son destin pourrait la conduire. Si son enfance a très tôt été marquée par le fer, son cœur est resté le même. C'est celui d'une femme qui ne peut haïr en définitive et chacun de ses actes, même légitimes, est toujours regretté. C'est pour cette raison aussi que tant de larmes sont versées dans ce drama. La même qui la rend tout simplement humaine et pour tout dire émouvante jusqu'à la dernière image. Faut-il en dire davantage ? Il suffit de regarder ce drama, pas comme les autres, pour comprendre le pourquoi de son succès tant en Corée qu'à l'étranger sans parler des récompenses largement méritées.
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