Mystérieux et un brin machiavélique, cette histoire d’amnésique ramené à la réalité est fort bien agencée et pour tout dire, diablement efficace pour le suspens, au point que le spectateur se demande, tout au long du film, ce qu’il peut bien y avoir derrière le comportement de chacun des protagonistes. L’oubli peut être bien commode pour certains en effet, surtout quand il s’agit de choses inavouables et pour ce qui est du développement de l’intrigue, les choses se présentent dans les faits, de la manière la plus banale. Sans même se rendre compte, le spectateur est introduit – comme pris en main par le scénariste – dans une sorte de huis clos fait de non-dits, à la fois étrange et glauque, si bien que chaque question qu’il se pose en appelle une autre. Rien ne permet de deviner, un tant soit peu, le pourquoi du malaise qui finit par se répandre progressivement et ce, durant une bonne moitié du film. A la manière d’un labyrinthe où nul ne sait quel chemin emprunter pour en sortir ou sur quoi cela pourrait déboucher, ‘‘Forgotten’’ entretient pour ainsi dire une atmosphère des plus pesantes digne des meilleurs thrillers. Quant aux raisons de cette entrée en matière, les amateurs du genre s’empresseront certainement de percer le mystère qu’il y a derrière car pour être bien amené, on pourrait y voir une sombre machination sauf que les apparences peuvent être trompeuses parfois… Aussi et dans la veine de tout bon thriller qui se respecte, chaque chose a sa place sans constituer de véritables indices pour autant ou sur le moment – le scénariste en joue allègrement – tout du moins, jusqu’à ce que leur accumulation finisse par dessiner un chemin que notre ‘‘héros’’ – Jin-Seok – va naturellement emprunter pour fuir un environnement dans lequel il se sent soudainement étranger et pour cause. La perte de mémoire n’est jamais totale et dans son cas, certaines bribes commencent à se mettre en place, comme les pièces d’un puzzle, pour le faire revenir à un moment précis de son passé. C’est-à-dire à une époque sans doute traumatisante, où toutes les choses pénibles ont été refoulées jusqu’à lui faire croire qu’il est possible de les enfouir à tout jamais ? C’est sur cette question du traumatisme pouvant entraîner une perte de mémoire que toute l’architecture du film est bâtie sauf que forcer une personne à retrouver ses souvenirs – même pour de bonnes raisons dans notre film – peut se révéler douloureux non seulement pour l’intéressé mais pour l’initiateur de l’entreprise également. Sans aller plus loin, disons que cette réalisation de Hang-Jung Zhang est une franche réussite. Sans faire appel à de gros moyens ni le moindre artifice, son film parvient à captiver jusqu’à la fin, sans coup d’éclat et en étant réaliste. Tout au plus, aurait-il pu conclure différemment pour ne pas rendre les choses trop dramatiques car si le fond de l’histoire repose sur la nécessité de rendre justice en faisant ressurgir le passé, le prix à payer est quand même exorbitant mais c’est un choix scénaristique au demeurant crédible quitte à rester dans la noirceur de ton adopté depuis le début. En un mot, ‘‘Forgotten’’ est un film original, doté d’un scénario cohérent pour ne pas dire brillant dans d’écriture, avec d’excellents acteurs pour lui donner corps et ce n’est pas tous les jours qu’on peut voir des thrillers de cette qualité.
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