"Nation branding"... Sous cette désignation, il n'y a pas que la connotation commerciale car la réalité est plus complexe depuis que les productions de la télévision coréenne et toute l'industrie du loisir, par la suite, sont devenues l'expression d'une identité nationale par la volonté de l'État. En d'autres termes, la Corée du Sud s'est inventée une notion inédite qui est celle de ''l'image de marque du pays'' à l'opposé de ''l'exception culturelle française'' qui se veut protectrice d'une culture voire conservatrice alors qu'il s'agit de sortir des frontières pour se faire connaître et s'exporter, dans tous les sens du terme, à commencer par son image.
C'est dire que la vision de ses cadres dirigeants est non seulement globale mais surtout ambitieuse à l'instar d'une multinationale en quête de nouveaux marchés et ce, dans un cadre économique largement mondialisé et concurrentiel depuis longtemps. Pour ce faire, la Corée du Sud s'est ainsi dotée d'un puissant outil de communication au fil des ans - grâce à ses produits culturels encore mal connus hors des frontières avant 1990 – et pour avoir surtout compris qu'à travers l'image notamment, elle pourrait en tirer de substantiels bénéfices non seulement sur le plan médiatique mais également économique. Au même titre que ses voitures et smartphones, par exemple, l'image qui renvoie habituellement à un pays, est devenue dans le cas présent, l'émanation même d'une culture et à fortiori, l'expression directe d'une identité. Autrement dit, le ''made in Korea'' estampillé sur un produit s'est effacé au profit du pays, tout simplement, comme si le client pouvait disposer d'un fragment...
Devenue un acteur influent sur la scène économique internationale et notamment dans le secteur de la haute technologie, la Corée n'a pas négligé son image pour ainsi dire à commencer par la valorisation de ses traditions et de son mode de vie afin de faire passer un message à résonance culturelle certes mais dans un esprit d'ouverture et de modernité sans jamais dévier de son objectif principal. C'est à dire vendre en jouant de l'attractivité que sous-tend toute démarche de séduction mais avec des méthodes du marketing développées et étendues à l'échelle d'un État. Aussi, culture et diplomatie se sont donc combinées pour soutenir une dynamique économique et dans un cadre de politique promotionnelle, tout azimut, du pays pour lui donner le rang qu'on lui connaît aujourd'hui. La Corée est parvenue à se hisser à la onzième place des puissances mondiales, au regard de son PIB, alors qu'elle figurait parmi les pays les plus pauvres au lendemain de la partition de la péninsule en 1953.
Désormais perçue comme un exemple de réussite, qu'en est-il de l'offensive Coréenne – assimilée à une déferlante dans les pays limitrophes de la péninsule au début des années 1990 jusqu'à son point culminant en 2000 pour ce qui est des productions audiovisuelles – rapportée à la réalité humaine sachant que la croissance du PIB d'un pays n'est qu'une donnée économique et nullement un indicateur social ni le reflet d'une société connue par ailleurs, pour ses scandales financiers - corruption de la classe dirigeante ayant entrainé, en mars 2017, la destitution du président de la République Park Geun-hye - la collusion entre sphère publique et privée dans la question des Chaebols (conglomérats industriels) sans parler du taux inquiétant de mortalité élevée, par suicide des étudiants, quand ce n'est pas des artistes de renom.
Faut-il donc en faire tout un drama pour en arriver là ? Les séries télévisées appelées drama – et destinées au grand public – avaient pour vocation de divertir avant que l'État coréen s'en saisisse pour en faire un outil de communication et rapidement de propagande. Dire que la Corée est allée trop loin risque de chagriner les amoureux sincères de ce pays et pourtant, on ne peut ignorer qu'une vitrine, aussi belle soit-elle, est faite pour donner envie de découvrir le magasin. En l'occurrence, il s'agit d'un pays où le Matin est tout sauf Calme au regard de son actualité, fort contrastée, pour peu que l'on regarde de plus près le quotidien.
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