Sans doute anecdotique dans le conflit qui opposa les États-Unis d’Amérique au Japon au cours de la Seconde guerre mondiale, ‘‘The lost soldier’’ n’en est pas moins un film attachant pour ne pas dire intéressant d’un certain point de vue. Intéressant parce que l’Histoire avec un grand H n’est pas faite que de grande batailles, de sacrifices ou d’actes de bravoure gravés dans le marbre de la mémoire collective. Elle est faite aussi et plus souvent qu’on ne le croit, de comportements isolés qui méritent qu’on s’y attarde. Pour écrire ne serait-ce qu’une page d’histoire proprement dit, il faut qu’il y ait des hommes et des femmes pour lui donner corps d’une certaine manière et c’est parfois au travers de la résistance à l’ennemi de la population civile, qu’on trouve encore les meilleurs exemples quand ce ne sont pas les plus parlants aussi. Par conséquent, la question d’une quelconque stratégie ne peut avoir de sens dans un tel contexte. C’est-à-dire défavorable, par nature, compte tenu de l’infériorité des forces face à un ennemi qui a de surcroît le contrôle de tout ou presque sans parler des armes qui manquent cruellement pour se défendre. Or, lutter par tous les moyens comme porter secours à ceux qui se retrouvent dans la même adversité que soi est une nécessité vitale. C’est ce qui est arrivé à des pilotes américains tombés – en retour d’une mission de bombardements du Japon en 1942 – dans la province de Zhejiang et qui servira de trame à cette histoire de soldat perdu ou plutôt caché dans le film. Ainsi posé, tout est dit et la question qui vient à l’esprit se résume en quelques mots. Faut-il en faire un film pour si peu quand on connaît déjà ce qui s’est passé à cette époque, dans les grandes lignes tout du moins ? Disons que Bill August – le réalisateur – ne prétend pas apporter quelque chose de nouveau à cette guerre car son film est une fiction inspirée de faits réels et encore une fois, mineurs au regard de tout ce qui s’est passé par la suite mais dans sa démarche, il est parvenu à donner une dimension humaine à son travail en montrant des visages dans lesquels chacun pourrait se reconnaître car la guerre est avant tout un malheur quand il ne s’ajoute pas à un autre malheur. Celui d’avoir perdu un être cher à la guerre en plus de voir l’ennemi, au seuil de sa porte, parce qu’il est à la recherche de ces fameux pilotes américains et gare à celui qui ose se mettre en travers de son chemin ou lui dissimuler quelque chose. Précis dans la façon de filmer, Bill August ne cède jamais à la facilité ni ne joue du pathos pour émouvoir et du coup, ‘‘The lost soldier’’ se révèle étonnamment attachant au fur et à mesure qu’on avance dans l’histoire parce que son héros – Jack, le pilote américain et blessé de surcroît – mérite vraiment qu’on lui porte secours. Ying, la jeune veuve chinoise, l’a d’ailleurs vite compris malgré le danger et les difficultés à se faire comprendre mais qu’importe... Délicat et interprété par des acteurs habités par leur personnage, les dialogues – de sourd par moment il faut le dire – sont toujours justes et les expressions en disent long sur les sentiments qu’ils finissent par avoir l’un pour l’autre en dépit de tout et ce, jusqu’à la séquence finale. Comme toute chose qui s’achève et surtout dans une guerre, dans le cas présent, il faudra donc payer un lourd tribu préalablement et aussi cruel qu’injuste, ‘‘The lost soldier’’ mérite qu’on aille jusqu’au bout parce que ce film en vaut vraiment le détour. Pour terminer, soulignons la qualité de la photographie qui est tout simplement irréprochable ainsi que le remarquable jeu d’acteur de nos protagonistes principaux à savoir, d’Émile Hirsch alias Jack et Crystal Liu dans le rôle de Ying.
Ker Asia
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