Reconnaissons que l’homme est bien mystérieux – pour une bonne moitié du film tout du moins – en effet et il vaut mieux ne pas se trouver sur son chemin. Il faut dire aussi que l’histoire réserve la part belle à cet inconnu – Cha Tae-sik – sur lequel repose tout le scénario qui reprend d’ailleurs tous les codes d’un thriller bien noir à ceci près. Depuis quelques années, le cinéma coréen s’est non seulement approprié le genre mais il l’a surtout rendu plus extrême au fil des productions. C’est à dire toujours plus sombre pour l’atmosphère quand il ne verse pas dans le sordide, dans les thèmes abordés, sans parler de la violence également poussée à l’extrême bien souvent. En terme d’écriture scénaristique, c’est sans doute ce qui fait tout l’attrait des thrillers made in Korea outre la plastique soignée, dans le cas présent, car on ne peut pas dire à la lecture du synopsis que ‘‘The man from nowhere’’ se distingue d’un thriller classique ou ne brille particulièrement par son originalité si tant est que le sauvetage d’une petite fille a de quoi donner envie de regarder un film quand bien même faut-il la mêler à une affaire sordide… Toujours est-il que notre homme mystérieux, tout de noir vêtu et qui aurait certainement préféré vivre dans l’ombre, se voit soudainement obligé de sortir de sa tanière à cause de cette même petite fille et c’est là que l’homme de nulle part vient en fait de quelque part au fil de l’histoire… Certes bien ficelée, cette affaire d’homme tranquille qui se met à devenir ou redevenir une machine à tuer n’est pas sans rappeler nombre de productions – tout genre confondu - reposant sur le thème de la métamorphose et dans lequel le spectateur voit les choses basculer brusquement voire déboucher sur un déferlement de violence à cause d’une étincelle – la petite fille dans notre cas – parce que des circonstances ont accidentellement réveillé les souvenirs enfouis de celui qui fuit son passé. En d’autres termes, la deuxième moitié du film ne sert qu’à justifier ou développer l’entrée en matière et il ne risque plus qu’à trouver une bonne raison pour se fâcher, pour de bon, si on peut dire. Pour revenir au mystérieux Cha Tae-sik incarné par l’acteur Won Bin, l’homme se montre efficace et on se demande bien pourquoi il fait tout cela – outre de se sortir des situations dangereuses avec une remarquable aisance – si ce n’est qu’à ses yeux, il y a une bonne raison pour justifier sa détermination quant à affronter une organisation criminelle versée dans le trafic d’organes. Bref, s’il n’a clairement pas froid aux yeux parce que personne ne risque de les lui prendre – vu comment il s’y prend avec ses adversaires – de surcroît, est-ce suffisant pour en faire un film censé faire frissonner ? Disons que l’histoire est plutôt simplette sans que cela soit péjoratif et le plus important est que tout se tienne pour qu’on ait envie de la suivre jusqu’à la dernière image... Sur ce point, les amateurs de thrillers ne se poseront, sans doute, pas trop de questions mais le simple spectateur d’action et d’intrigue ne manquera pas de se dire ‘‘Tout ça pour ça…?’’. La violence est souvent un élément commun à bien des genres cinématographiques et parfois, qu’un prétexte aussi pour rendre digeste l’indigence d’un scénario. Sans vouloir être trop sévère, celui-là est tout juste passable. Il y a du suspens au début tout du moins mais hélas balayé rapidement par une démarche somme toute classique quant à entretenir le mystère en parlant d’un homme que personne ne connaît. Sans doute fallait-il épaissir davantage le mystère autour de ce Cha Tae-sik, aussi éloquent d’ailleurs qu’un couteau entre les mains d’un boucher, et entretenir le même mystère autour de la petite fille pour expliquer le pourquoi de leur relation. Au lieu de quoi, la séquence finale laisse perplexe si ce n’est pour montrer que notre homme, de nulle part, à un grand cœur ? Comprendra qui peut… Notons tout de même que les scènes de violence sont suffisamment réalistes pour en faire un solide film d’action mais certainement pas un bon thriller.